En
octobre dernier, le Japan Times nous offre une nouvelle assez cocasse qui nous
informe que suite à une rencontre entre le maire et Abe Shinzo, la ville de
Nagoya fut élue « ville la plus ennuyeuse du Japon ». Abe Shinzo
déclara solennellement que « ce n’est plus une blague de considérer que
Nagoya est un endroit où personne ne veut aller ». Propos durs mais
avérés. Pour étudier ce cas, l’histoire de Nagoya semble primordial, ensuite
son essor économique et ce que Nagoya represente pour le Japon, pour finir sur
ce pourquoi le mot ennuyant n’est pas valable pour cette ville.
Aussi petit rappel
sur l’histoire de Nagoya : Nagoya, aussi appelée « plus grosse région
de money-making » du
japon. Située au fond de la baie d'Ise, Nagoya est la capitale de la
préfecture (ken) d'Aichi, au cœur de l'île d'Honshū, et l'une des plus grandes
villes industrielles du Japon. Elle comptait en 2006 2 223 148 habitants et la
mégapole du Grand Nagoya quelque 8,6 millions d'habitants. C'est la troisième
aire métropolitaine du pays.
L'histoire de Nagoya
remonte à l’ère Muromachi (1333 à 1582 ap. J.-C.). A l’instar de
nombreuses villes européennes, la vie et l’extension de la cité gravitent
autour de l’important sanctuaire Shintô Atsuta-jinja fondé au VIIIèmesiècle.
Les cités connaissant ce type de développement se nomment
« Monzen-machi ». Ce développement se traduit par une expansion
démographique, territoriale et économique de petits hameaux ou villages situés
aux abords ou autour de centres religieux. La ville vit naître deux des
personnages historiques les plus importants de l’histoire du Japon : Oda Nobunaga (信長 織田 1534-1582) et Toyotomi Hideyoshi (秀吉 豊臣1536-1598). L’archipel doit, notamment, à ces deux figures
historiques l’unification du Japon. C’est par ailleurs Oda Nobunaga qui
conquière grâce à Tokugawa Ieyasu (徳川家康 1543 - 1616) au XVIème siècle la ville de Nagoya. Elle était
alors le fief de la famille Imagawa apparentée aux Ashikaga, ennemie
héréditaire de la famille Oda. En 1600 la ville devient le berceau de la
famille Owari. En
1610, un grand château fut érigé par la
maison Owari du puissant sh̄ogunat des Tokugawa. Après la restauration de Meiji
(1868), qui marqua la fin du gouvernement sh̄ogunal, Nagoya devint un centre de
commerce. Le développement de son port, en particulier après la Seconde Guerre
mondiale, l'implantation centrale de la ville et les puissantes installations
hydroélectriques construites sur les fleuves arrosant le centre de l'île
dopèrent l'essor des industries lourdes. Aux ateliers traditionnels fabriquant
montres, bicyclettes et machines à coudre vinrent bientôt s'ajouter des usines
produisant des aciers spéciaux ainsi que des produits chimiques, pétroliers et
pétrochimiques à mesure que les industries automobiles, aéronautiques et
navales se développaient.
Plusieurs lignes de
chemin de fer, y compris la ligne à grande vitesse Shinkansen reliant Ōsaka à
Tōkȳo, convergent à Nagoya. La ville est également ouverte sur le monde grâce
à son port, connecté aux zones industrielles de l'intérieur de l'île par un
réseau de canaux. Elle était desservie, jusqu'en février 2005, par l'aéroport
de Nagoya (situé au nord de la ville) qui a été remplacé depuis par l'aéroport
international de Chūbu construit sur une île artificielle.
De nombreux
établissements supérieurs ont élu domicile dans la ville, tels que l'université
de Nagoya (1939), l'institut technologique de Nagoya (1949) et l'université de
la ville de Nagoya (1950). Le château, construit par Ieyasu Tokugawa en
1610-1612 puis détruit par les bombardements pendant la Seconde Guerre mondiale. La ville est alors quasiment rasée. Par la suite,
complètement reconstruite sur un modèle résolument moderne et fonctionnel, elle
devient au sortir des années 40 et 50 une importante citée industrielle.
Le musée d'art Tokugawa abrite les collections de la puissante famille nippone.
Le sanctuaire d'Atsuta et le grand sanctuaire d'Ise, tout proche, sont les plus
vieux temples shint̄o du Japon et les plus honorés. La ville peut également
s'enorgueillir de son auditorium, du centre culturel Aichi, de la tour Chunichi
et du théâtre Misono. Le parc Higashiyama est quant à lui réputé pour ses
jardins zoologique et botanique. Son expansion et
dynamisme sont tels que Nagoya devient la 4ème ville du Japon. Répartie en 16
quartiers (Atsuta-ku, Chikusa-ku, Higashi-ku, Kita-ku, Meito-ku,
Midori-ku, Minami-ku, Minato-ku, Mizuho-ku, Moriyama-ku, Naka-ku, Nakagawa-ku,
Nakamura-ku, Nishi-ku, Showa-ku, Tempaku-ku), la ville occupe aujourd’hui une
surface de 326,45 km² et sa population est estimée en 2008 à 2 243 564
habitants.
Pour en
revenir à cet article plus amusant qu’intriguant du Japan Times, en effet,
actuellement pour les japonais, malgré l’histoire passionnante qu’a pu vivre
cette ville incroyable, s’ils se rendent en visite à Nagoya, ce ne sera que
pour affaires familiales ou professionnels, jamais par plaisir. Ayant vécu un
an à Nagoya j’ai pu observer les « touristes » et « natifs »
et leur poser quelques questions comme « qu’est-ce qu’il vous plait
ici ? » ,… Chaque fois un peu gênés mais sérieux, tous me répondaient
« Ici il n’y a pas grand-chose à voir, mais c’est chez nous ». Pour
citer l’article du Japan times : Après tout, c’était la ville de Nagoya
qui a conduit à une enquête à résultat défavorable l’été dernier auprès des
résidents des huits « villes clefs » pour déterminer laquelle avait
le plus d’attrait pour une destination de voyage. Nagoya est arrivée dernière
pour presque chaque catégorie, mais ce que les gens ont trouvé cocasse était
que chaque résident votait pour sa ville respective comme leur favorite, sauf
pour les résidents de Nagoya, qui choisissait la leur en troisième place après
Tokyo et Kyoto. On ne peut plus juger cela de modestie mais de réalisme. J’ai
moi-même eu cette évolution dans mon discours, au départ je démentais en
déclarant que si, il y a beaucoup de chose à visiter à Nagoya, et petit à petit
je me suis rendu à l’évidence qu’effectivement pas vraiment. Mais cela ne veut
pas dire « ville ennuyeuse ».
D’abord
il faut prendre en compte l’échelle Japon. Le Japon, pays ultra-modernisé,
traditionnel, intriguant, pays du manga, de l’anime, de l’hentai, et des choses
farfelus, et j’en passe. Chaque individu extérieur au Japon a pu avoir un
aperçu de chacune de ses catégories. « Peut-être à cause que les habitants
de Nagoya restent dans le préjudice général que le charisme de leur ville est
plus rustique qu’urbain, spécialement en s’intéressant aux « attractions »
auquelles les touristes pourraient s’intéresser. Première réponse à cette
question était « rien », suivit par le Château de Nagoya et la
cuisine locale. » Nagoya est l’une d’une des plus grandes villes du Japon
(la troisième), ultra-urbanisé mais avec « une mentalité de gens de la
campagne ». Cela était littéralement la description à laquelle j’ai eu le
droit par ces habitants de Nagoya.
Mais
effectivement, ne pas oublier que Nagoya est la troisième principauté du Japon.
L’industrie du Japon se centralise essentiellement sur cette ville. « Il y a à peu près cinquante ans, le
département de Osaka était le premier pour la production industrielle. Mais,
depuis 1 930, Tokyo s'est substitué à Osaka. Après 1 980, le développement de
Aichi est devenu le plus rapide. Nous pouvons en indiquer quelques raisons.
Premièrement, à Tokyo et Osaka beaucoup d'usines sont installées hors du
département (ou Préfecture). Donc, la production industrielle de Tokyo et de
Osaka est restée stationnaire. Mais, à Aichi l'implantation d'usines s'étant
effectuée dans le département, la production de Aichi a été en constante
augmentation. Deuxièmement à Toyota, le développement de l'industrie automobile
est important. Mais pour Nagoya même, nous pouvons mentionner le même phénomène
que pour Tokyo et Osaka, c'est-à-dire, le déclin de l'industrie, au profit du
secteur tertiaire. Nous pouvons indiquer que les évolutions comparatives de
Aichi et du Japon ont des points communs et que l'évolution de Aichi est plus
importante que celle du Japon. Le tableau n° 3 indique le détail d'un
inventaire des productions. En particulier, l'industrie des transports et la
sidérurgie se sont développées. Il est important de remarquer que l'industrie
des transports (automobiles) s'est beaucoup développée à Toyota. C'est-à-dire,
le développement de l'industrie de Aichi n'est pas causé par celui de
l'industrie de Nagoya, mais par le développement de l'industrie de la banlieue
de Nagoya. »
Nagoya
est donc le cœur industriel du Japon (regroupant à elle-seule le PIB du Japon).
Malgré cela, la ville ne reçoit que peu de touriste. Certes, la ville reçoit
des milliers de touristes s’arrétant par Nagoya puisqu’elle se situe à
l’emplacement idéal pour faire un voyage tout autour, grâce à la proximité des
villes les plus visitées. Effectivement, que ce soit pour se rendre à Osaka,
Kyoto ou Ise, Nagoya est la parfaire escale.
Mais revenons à pourquoi Nagoya ne devrait pas être qualifiée d’ennuyante.
Pour les monuments à notoriété touristique, la liste sera courte, certes.
Premièrement, le Château de Nagoya, cité plus haut, historiquement riche.
Deuxièmement, est très peu reconnu (modestie de Nagoya), le plus grand
planétarium mondial. Troisièmement, son port immense. Et finalement son
aquarium.
Pourtant
comme toute grande ville Nagoya nous offre ses quartiers commerçants couverts,
typiques du Japon (ici Osu-kannon et Yabachô). Ensuite, des temples nombreux,
avec ses principaux (Osu Kannon, Atsusa-Jingu,…), ses parcs et longements de
rivières toujours très fleuris et entretenus (à ne pas manquer à la saison des
Hanami). Si les envies sont plus dans la Pop-culture, se rendre alors à
l’immense quartier de Sakae, où de jour le monde du shopping vous appartient
avec des centres commerciaux de partout, et dès que le soleil se couche une
tout autre activité se transforme et les jeunes s’y précipitent. Tout cela
possible grâce à un réseau bien pensé, pratique, et disponible à des horaires
tout à fait acceptable du service des métros de Nagoya.
Grâce à Youtube, faire
de la publicité en image attrayante est devenue facile. C’est le cas aussi avec
Nagoya, depuis plusieurs années, de nombreux Youtuber essayent de faire monter
la côte de Nagoya. Les étrangers aussi se sentent concernés par l’affaire et se
précipitent pour en faire de même. Par exemple ce Youtuber français : https://www.youtube.com/watch?v=4BaK3jUjqOg&t=1302s.
Il nous montre les
attraits de Nagoya et principalement sa gastronomie, qui compte au Japon parmis
les plus prisées. De plus de nombreux blog nous donne envie de découvrir Nagoya
par leur bons plans ou propres découvertes, par exemple http://nagoya-en-francais-2.over-blog.com/tag/nagoya/.
Pour
conclure, Nagoya n’est certes qu’une ville industrielle, mais n’a rien
d’ennuyante. Sur l’échelle du Japon si on la compare aux géants (Tokyo, Osaka,
Kyoto), Nagoya devient insignifiante dans le tourisme. Pourtant Nagoya a de
quoi fournir ses touristes et habitants tout ce dont ils peuvent avoir besoin
ou envie. J’en suis l’exemple. Même si touristiquement beaucoup d’autres
endroits au Japon sont plus intéressants historiquement, culturellement, j’en
suis arrivée à la même conclusion que tous les habitants de cette ville
« Nagoya ? Oui c’est vrai il n’y a rien, mais c’est chez moi et on y
est bien ».
Bibliographie :
- Thomas Burelli,
Faut-il se réjouir de la conclusion du protocle de Nagoya, revue juridique de
l’environnement, volume 37, 2012
-Abe KAZUTOCHI, Nagoya
et sa banlieue. Population, industries et fonctions urbaines (Nagoya and its
suburbs), Bulletin de l'Association de géographes français, N°505-506,1984. pp.
315-319
Webographie :
-Encyclopédie
Universalis
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